Le 31 _ 2023
31-2022 _ 01-2023
Nous voilà de nouveau sur le rituel du 31. Des amis, une cabane en montagne, une txulet et "rideau" comme dirait Pierre O.
Ce 31 ressemble à notre année. On en a mis des choses dans notre sac, des bonnes, comme des moins bonnes. On s'est cassés les reins à tout monter, on a tout déballé et on a repris de plus belle, comme si rien ne s'était passé.
Le départ fut quelque peu incertain. Pas faute d’avoir checké les endroits, d’avoir consulté toutes les prévisions et d’avoir proposé à tous les potentiels possibles. Comme toute entreprise, rien ne se passe comme prévu, alors on se lance.
Le premier plan fut compromis par une route fermée. Pas réellement un problème, puisqu'il suffit de contourner cette dernière par le chemin de randonnée, mais contraignant, on rajoute 5 km et pas mal de dénivelé. Le chemin est déjà long, alors, qui veut en rajouter ? Pas nous !
Deuxième plan, on fonce tête baissée, ça chante dans la voiture sur du Calypso Rose et du Pierpoljak, ça se raconte des histoires de voyages, de montagne et puis… "Merde, je viens de me rappeler que la route pour le lac de Bious est ferméel’hiver …" Un coup d’œil au GPS que j'avais mal regardé, la route est bien fermée ! Jamais facile de se prendre un "stop" au dernier moment.
Ça casse le rythme, ça brouille les esprits et ça demande un sacré effort de réorganisation. En soi, ça rallonge juste de quelques kilomètres la rando, mais on doit passer par la route et ça, ce n’est pas notre kiffe de marcher sur la route que tout le monde peut emprunter. On a envie de sentiers tortueux, on veut découvrir des choses que tout le monde ne peut voir, on veut se sentir un peu privilégiés.
Troisième plan. On arrive à Eaux-Chaudes et ça nous rappelle notre épopée d’il y a 3 ans. Une virée à trois, de nuit, dans le blizzard dont je vous laisse vous rafraîchir la mémoire dans le lien ici Cabane de Besse. Cette fois la neige est bien haute et l'on commence la randonnée depuis le village de Goust. Avec un ISO 0 à 3 000 m et une température de 20°, on abandonne vite les couches chaudes pour monter en tee-shirt.
On commence par 800 m de D+ sur 5 km. Ça monte sec et l'on en a plein notre cul. On en a gros dans le sac, on y a mis tout ce que l'on pensait bon. C’est le début, alors ça discute, on refait le monde au rythme de nos souffles courts et au fur et à mesure, chacun rentre dans ses pensées et économise son souffle. Par endroit, on glisse et l'on manque de tomber. On finit par n’entendre que les oiseaux et le souffle du vent. On passe le plat du Lusque, on gravit encore un bon dénivelé dans la forêt, un petit bonjour au chasseur qui guette la battue. Un prétexte pour rouvrir la discussion entre ceux qui ne les aiment pas et ceux qui s’en foutent.
Puis cette cabane se fait désirer, le silence reprend, on transpire en ce 31 décembre, on a mal au dos et l'on commence àrentrer dans des pensées plus vives. Est-ce que l'on a bien tout dans ce sac ? On en a même trop, c’est sûr ! Ras-le-cul de ce sac, l’envie de le déballer dès que possible, faire une grande pause et voir si ça en vaut vraiment la peine. La question ne se pose pas, le soleil continue sa course et le temps ne s’arrête pas sur nos « petits bobos ». On y est presque, un dernier panneau indique le col de Besse et la cabane n’est qu'à quelques mètres.
Nous y voilà enfin, on pose les sacs et on déballe les affaires qui ne sont pas nécessaires pour l’ascension finale. Un café...on discute avec les randonneurs qui pique-niquent à la cabane et puis on reprend de plus belle pour la dernière ascension de l’année. Le sac est déjà plus léger et l'on se sent revivre un peu. Arrivés sur la crête, le vent souffle si fort qu’il nous pousse à nous en faire tomber. Le paysage est sublime, nous n’échangeons pas un mot, nous contemplons.
Au pied du pic l’Escala (2 076 m) un névé occupe le couloir où l’on doit grimper. Comme d’habitude, je suis craintif, mes camarades moins. Avec la chaleur, la neige est pourrie et il nous est facile d’y planter les pieds. Voilà le lac du Montagnon et en face de nous le pic Mardas (2 188 m) que j'espérais pour le coucher de soleil.
Malheureusement, une avalanche bloque le couloir de montée et vu la qualité de la neige, hors de question d'y aller. Nous nous replions sur le pic Escala, où l’apéro sera le bienvenu. Le soleil passe derrière les sommets, il est temps de redescendre. On a faim et on a tous en tête la txulet au feu de bois qui nous attend. Un splendide kilo de viande maturée à souhait !
Le sac fut lourd et le chemin parsemé d'embuches. On aurait pu rester à la maison sans bouger, au chaud, préparer le même repas, avec encore plus de personnes, encore plus de victuailles et encore moins d’efforts. Mais on aurait pris moins de risques, moins souffert, mais aussi moins de souvenirs. Et, quel goût cette txulet dans la nature, quel panache ce 31 et quelle intensité ce feu !